vendredi 14 décembre 2012

Berne accorde aux banques une marge de manœuvre

Eveline Widmer-Schlumpf n'exigera pas des banques qu'elles fassent signer une déclaration à leurs clients pour s’assurer qu’elles n’acceptent pas d’argent non déclaré. Le PS accuse le Conseil fédéral de «céder au lobby financier» Le Conseil fédéral renonce à exiger une auto-déclaration des clients des établissements bancaires. Les banques ne seront donc pas forcés d'exiger que leurs clients signent un document garantissant que leurs avoirs ont été déclarés au fisc de leur pays d'origine.

Le gouvernement a pris cette décision ce matin, premiers jalons de sa stratégie pour l'argent propre. Mais «cette décision ne nuira pas à notre stratégie», estime la ministre des Finances, Eveline Widmer-Schlumpf. Car «le gouvernement souhaite avant tout une règle qui soit applicable et puisse fonctionner.»

Plutôt que d'imposer une obligation irréaliste, le Conseil fédéral opte plutôt pour une autorégulation de la branche financière elle-même. Celle-ci devra se faire sous le contrôle de la FINMA, l'autorité de surveillance des marchés financiers. Le Département fédéral des finances (DFF) a par ailleurs créé un un groupe d'experts indépendants qui sera chargé de proposer différentes variantes pour l'évolution de la stratégie fiscale.

Un vœu de la place financière

L'abandon de l'auto-déclaration obligatoire répond à un vœu de la place financière. «L'auto-déclaration est une fausse bonne idée et nous la rejetons fermement», affirmait ce matin Patrick Odier, président de l'Association suisse des banquiers, dans les colonnes du Temps. «Aucun pays ne l'exige, ce n'est pas un standard international.»

Et surtout, «comment être sûr qu'un client ne ment pas à sa banque lorsqu'il signe s'il a déjà menti à son fisc?» ajoutait Patrick Odier. «Cela pourrait se retourner contre la place financière, qui aurait proposé une mesure non crédible.»

Le PS pas d'accord

En revanche pour Christian Levrat, président du Parti socialiste, cette annonce est un très mauvais signe: «Le Conseil fédéral ne fait aujourd'hui qu'entériner les vœux des banquiers et il continue à jouer la montre. C'est impressionnant de voir à quel point les souhaits de ce lobby sont suivis à la lettre.»

Pour le sénateur fribourgeois, le milieu bancaire «a dissuadé le gouvernement de faire le moindre pas en direction d'une vraie stratégie de l'argent propre. Les mesures annoncées aujourd'hui par le Conseil fédéral ne sont que de la poudre aux yeux.»

Satisfaction à droite

Accueil plus favorable dans le camp bourgeois: «Ce sera la responsabilité de la FINMA de veiller à ce que le système soit crédible», déclare à l'ATS Christophe Darbellay, président du PDC. «Nous étions ouverts sur la manière de mettre en œuvre cette surveillance.»

Le Valaisan ajoute que «c'est un sujet délicat et il faut éviter se mettre un autogoal par rapport aux places financières concurrentes.»

L'UDC se félicite de la décision du jour: «Le Conseil fédéral semble avoir fini par comprendre qu'une auto-déclaration obligatoire imposée aux clients ne constitue pas une solution raisonnable dans la pratique», écrit le parti dans un communiqué. Et d'ajouter: «Pour l'UDC, il est hors de question de faire jouer aux banques un rôle de percepteur.»

Nouvelles règles

Eveline Widmer-Schlumpf a indiqué par ailleurs que le Conseil fédéral devra prochainement mettre en consultation les nouvelles règles du GAFI (Groupe d'action financière). Selon cet organisme international, les graves infractions fiscales seront à l'avenir qualifiées d'infraction préalable au blanchiment d'argent.

«Sur ces règles-là, le Conseil fédéral n'a pas le choix, il est forcé de les mettre en œuvre», observe Christian Levrat. «C'est le strict minimum international en matière de lutte contre l'argent sale.» (Newsnet)

Créé: 14.12.2012, 17h24

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