mardi 26 mars 2013

Sommaruga ne veut pas d'élection par le peuple

Une élection du Conseil fédéral par le peuple nuirait à la stabilité du pays. Forte de cet avis, Simonetta Sommaruga a lancé mardi la campagne contre l'initiative de l'UDC. Le gouvernement restera toutefois en retrait d'ici la votation du 9 juin.On pourrait reprocher au Conseil fédéral de vouloir préserver ses intérêts, a expliqué la ministre de la justice devant la presse. Elle est toutefois restée vague sur ce retrait.

Le gouvernement n'a ainsi pas encore décidé s'il enverrait ses représentants sur les plateaux de télévision. Quant aux discussions publiques, Simonetta Sommaruga estime qu'il appartient davantage aux parlementaires d'y participer.

Pas en 2015

Une chose semble en revanche claire: si un «oui» sort des urnes le 9 juin, le peuple ne doit pas s'attendre à pouvoir déjà choisir directement le Conseil fédéral lors des prochaines élections fédérales à l'automne 2015. «Ce n'est pas réaliste», a fait savoir la conseillère fédérale.

Il faudra encore adopter une législation d'application. Et plusieurs questions compliquées devront trouver réponses, notamment celles concernant les minorités linguistiques. Flanquée pour l'occasion du président du conseil des Etats Filippo Lombardi (PDC/TI), la ministre de la justice a insisté sur les défauts du mode de scrutin prévu.

L'initiative prévoit une élection tous les quatre ans au système majoritaire. La Suisse formerait une seule circonscription électorale. Mais une clause, comparable à celle qui prévaut à Berne pour le Conseil d'Etat, accorde toutefois au moins deux sièges aux Latins.

Ou plus précisément aux citoyens domiciliés dans les cantons du Tessin, de Vaud, de Neuchâtel, de Genève ou du Jura, dans les régions francophones du canton de Berne, de Fribourg ou du Valais ou dans les régions italophones du canton des Grisons.

Mauvais pour les Latins

Cette définition posera inévitablement des problèmes de délimitation entre régions voire entre habitants d'une même région, selon Simonetta Sommaruga. Autre conséquence néfaste: ce mode de scrutin mettrait les Romands en concurrence avec les Tessinois, quatre fois moins nombreux, pour les deux sièges réservés.

Les Tessinois n'auront aucune chance, a pronostiqué Filippo Lombardi. Pis, les Latins dans l'ensemble n'y gagneront rien. L'initiative limiterait à tout jamais leur représentation au Conseil fédéral à deux sièges, a-t-il affirmé, tout en brandissant le risque d'un futur «à la belge» pour la Suisse.

Certes l'initiative de l'UDC, en offrant davantage de pouvoir au peuple, est a priori séduisante et son acceptation ne serait pas la fin du monde. Mais une élection populaire du gouvernement changerait fondamentalement la vie politique helvétique. Il n'existe d'ailleurs aucun pays au monde qui élise l'ensemble de son gouvernement.

Campagnes permanentes et onéreuses

Parmi les inconvénients décrits par le Conseil fédéral, celui de conduire à des campagnes permanentes. Les conseillers fédéraux seraient davantage soucieux de leur réélection que du bien public. Ils devraient se démarquer à tous prix et soigner encore plus leur popularité. La recherche du consensus et la collégialité en pâtiraient.

Ces campagnes seront d'un tout autre ordre que celles qui prévalent dans les cantons, où l'exécutif est élu au suffrage universel. Il faudra les mener dans tout le pays, avec ses huit millions d'habitants, ses quatre langues et ses différentes cultures. Les cantons fortement peuplés seront privilégiés.

Mais il faudra aussi dépenser plus. Les candidats dépendraient donc davantage de leur parti mais aussi de riches individus, entreprises et groupes d'intérêt. L'enracinement des membres du Conseil fédéral dans leur région risque de ne plus avoir plus la même importance, le rôle des sections cantonales de parti passant en arrière plan.

Parlement affaibli

Le président du Conseil des Etats et le conseillère fédérale ont aussi mis en garde contre un affaiblissement de l'Assemblée fédérale, qui élit actuellement les ministres. Or il n'y a pas de meilleur organe que le Parlement pour représenter la diversité politique et culturelle de la Suisse, a estimé Filippo Lombardi.

Enfin, entre élections et votations, le peuple a déjà passablement son mot à dire, a noté Simonetta Sommaruga. Il a été consulté plus de 200 fois ces derniers vingt ans.

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