
La Confédération devrait aussi s'engager davantage financièrement, ajoute M. Brägger, secrétaire de la Commission des affaires juridiques pénales de la Conférence des directeurs cantonaux de justice et police. Cela permettrait notamment de mieux gérer l'ensemble des places de prison dans tout le pays.
A l'heure actuelle, «personne ne sait de combien de places et d'établissements on dispose exactement et combien d'entre elles sont libres». «Pour trouver un détenu, il faut faire 26 téléphones à 26 cantons». «C'est impossible», s'indigne l'expert, également chargé de cours en droit de l'exécution des peines aux Universités de Berne et Lausanne.
Les deux concordats alémaniques sur l'exécution des peines ont une philosophie commune, ajoute le docteur en droit. Mais dans celui de la Suisse latine: «chaque canton bidouille de son côté».
Système vaudois accusé
Dans le canton de Vaud, endeuillé par l'assassinat de Marie, le problème est structurel, critique M. Brägger. En Suisse alémanique, jamais le recours d'un détenu si dangereux contre sa remise en détention n'aurait pu bénéficier d'un effet suspensif, estime-t-il.
Une enquête administrative sur les dysfonctionnements de la justice qui ont conduit à la mort de la jeune fille de 19 ans démarrera le 27 mai. Son ravisseur, déjà condamné pour assassinat, était depuis août 2012 en arrêts domiciliaires, muni seulement d'un bracelet électronique.
L'effet suspensif accordé à l'assassin de Marie après le recours de celui-ci contre sa réincarcération ne constitue pas une particularité vaudoise, a expliqué de son côté Bertrand Perrin, professeur de droit pénal à l'Université de Fribourg, interrogé jeudi par l'ats. «En Suisse, l'effet suspensif est soit octroyé automatiquement, soit après demande du recourant».
Le Code pénal prévoit un examen de dangerosité du détenu avant de lui octroyer la possibilité de travailler puis de loger à l'extérieur, a-t-il rappelé. Cette appréciation se fait dans la pratique avant tout sur la base de dossiers, de rapports et d'auditions de l'intéressé. «Des grilles d'analyse et des méthodes de travail qui ne sont pas assez semblables dans toute la Suisse», avait lui aussi critiqué le professeur fribourgeois.
«Système perfectible»
«Il y a eu dans le cas présent un grand cafouillage entre les institutions administratives, exécutives et judiciaires», analyse pour sa part Christian-Nils Robert, professeur honoraire de droit pénal et criminologie à l'Université de Genève. «Les bracelets électroniques peuvent être octroyés en fin de peine, mais pas pour des délinquants de ce type, surtout si le détenu a écopé de 20 ans de réclusion.» En outre, les autorités décisionnelles n'ont pas collaboré, mais se sont contredites dans leurs décisions.
«S'il ne faut pas légiférer à chaque fait divers», le système demeure perfectible, estime M. Robert. Il y a trop de flou dans les compétences. Il manque aussi aux juges une formation spécialisée en criminologie afin de posséder les compétences nécessaires pour gérer les fins de peines de tels criminels.
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