«C'est un vrai coup de poignard dans le dos»

Comme le mettait en lumière L’Agefi il y a quelques jours, l’Administration fédérale des douanes a mis le 13 juin en consultation un projet de révision des dispositions légales relatives à l’importation de marchandises dans le trafic touristique. Cela dans le but d’alléger le travail administratif des douaniers et de fluidifier la circulation aux postes frontières.
Les professionnels outrés
Une modification encore au conditionnel pour l’instant. Mais qui fait déjà monter aux barricades professionnels de la branche et politiques. «C’est exclu que l’on accepte ça, cette proposition est absolument inadmissible! s’emporte Christophe Darbellay, président du PDC et grand défenseur des vins suisses, puisqu’il s’est notamment battu pour que les réceptions officielles à Berne ne servent que des vins du pays. Vingt litres, c’est la moitié de la consommation annuelle moyenne d’un Suisse. La viticulture suisse se trouve dans une crise sans précédent et on veut encore accentuer la pression en lui opposant des vins étrangers vendus à vil prix! Je me battrai jusqu’au bout contre cette idée. C’est un véritable coup de poignard dans le dos de l’agriculture suisse.»
«Du grand n’importe quoi!»
Un courroux partagé par Patrice Walpen, directeur de Favre Vins à Sion: «C’est du grand n’importe quoi! Je ne suis pas pour le protectionnisme à tout prix, mais là ce n’est pas ouvrir une barrière. Il n’y a tout simplement plus de barrière. Actuellement 62% des vins consommés en Suisse sont déjà de l’importation. Le tourisme d’achat coûte des milliards à la Suisse et il faudrait encore ouvrir la possibilité de ramener plus de vins? La Suisse est entourée de grandes régions viticoles. Avec cette décision on va inciter les gens. Avec 20 litres autorisés, plus personne ne se limitera à 2 litres! Et je suis outré que l’on essaie de faire passer ça pendant la période d’été.»
Un calendrier qui, selon l’ancien fonctionnaire Christophe Darbellay, ne doit rien au hasard: «Je sais très bien comment cela fonctionne. Quand on veut faire passer une consultation sans faire de vagues, on la fixe toujours en plein été en prétextant qu’il s’agit de petites mesures sans conséquence. Et à la rentrée le projet est accepté.»
Claude Crittin, président de la Société des encaveurs valaisans, s’inquiète également: «Je constate que, dans toutes les négociations internationales, les producteurs de vin ont fait des concessions et accepté des conditions qui ne leur étaient pas avantageuses, et encore une fois on leur rajoute un obstacle sans rien leur proposer de positif en échange. Si le but est de simplifier le travail des douaniers, que l’on nous supprime aussi à nous quelques paperasses.» Chez Gilliard Vins, à Sion, Marek Moos, responsable marketing, critique plus la forme que le fond: «Proposer une telle consultation maintenant, alors que la viticulture est en crise et que de nombreux domaines ont été fortement touchés par la grêle, est pour le moins maladroit. Sans compter que passer de 2 litres à 20 litres est assez surréaliste. Mais, sur le fond, bien sûr que les vins étrangers sont une concurrence. Mais ça n’est pas la seule. Lorsque des producteurs vendent une dôle suisse à 6 francs, ce qui ne couvre même pas le prix de la vendange, c’est également une pratique qui pénalise le marché. Nous devons nous concentrer sur nos produits, leur qualité, leur rapport qualité-prix, sans trop nous préoccuper de nos voisins.»
Affaire à suivre, la consultation est ouverte jusqu’au 13 août. (Le Matin)
Créé: 22.07.2013, 07h08
0 comments:
Enregistrer un commentaire